VI année, 1964, Numéro 2, Page 63
La fin de l’équilibre bipolaire
Notre revue était en voie de publication lorsque nous sont parvenues les nouvelles concernant la chute de Khrouchtchev et l’éclatement de la bombe chinoise. Ces faits ont une signification très claire. Ils marquent le passage de la première à la deuxième phase du système mondial des Etats qui s’est instauré à la fin de la dernière guerre mondiale sur les ruines du vieux système européen (national et colonial). Mais il n’est pas facile d’en reconnaître dès maintenant le caractère. Aucun fait accompli ne nous aide parce que les faits accomplis concernent la phase précédente. Et aucune idée toute faite non plus, car ces idées correspondent elles aussi à la phase révolue. Il va de soi que, tant que nous ne nous en débarrasserons pas, nous ne pourrons que projeter dans le monde de demain celui d’hier, tandis qu’il est certain que bien des choses qui sont apparemment encore très solides changeront. Il s’agit donc de faire un effort pour éliminer les idées toutes faites que nous gardons présentes à l’esprit et pour les remplacer par celles qu’une première analyse rationnelle peut nous suggérer. Nous dirons, pour préciser davantage, qu’il s’agit avant tout d’identifier le fi conducteur qui relie la chute de Khrouchtchev et la bombe chinoise à la ligne de développement de la politique mondiale, et ensuite de prévoir (du moins approximativement) ce qui va changer.
Le caractère des faits.
Avant tout il faut les replacer dans leur cadre historique en rappelant : a) que la première phase du système mondial des Etats a eu un caractère bipolaire car à l’origine le poids des U.S.A. et de l’U.R.S.S. dans la balance mondiale du pouvoir était écrasant ; b) qu’elle ne pouvait pas durer longtemps car ce poids écrasant était en même temps précaire, en raison de la disproportion existant entre la dimension des puissances hégémoniques et celle des zones soumises à leur contrôle. Au début cette disproportion fut atténuée par le caractère presque exclusivement militaire des rapports de pouvoir durant la guerre et l’immédiate après-guerre. Mais avec la paix, fruit de ce qu’on a appelé l’équilibre de la terreur (il vaudrait mieux parler de “trêve” parce que dans la “communauté internationale” la “paix” comporte l’armement des Etats et les guerres limitées) elle se manifesta de plus en plus. Les embryons de vie nouvelle engendrés par le développement de la production matérielle et, dans le domaine politique, par la fin du nationalisme et du colonialisme de la vieille Europe — d’une part l’intégration européenne, de l’autre l’émancipation du Tiers Monde — se développèrent rapidement, en augmentant leur poids. Et il y a plus. Parmi ces centres nouveaux, certains étaient de nature à augmenter le nombre des pôles du système car ils auraient pu, une fois développés complètement, exploiter au moins en partie une dimension continentale et acquérir de ce fait un véritable pouvoir de décision à niveau international.
Or le premier exemple de ce développement a été la Chine. Khrouchtchev est tombé justement parce que le sort l’a obligé à diriger la tentative faite par l’U.R.S.S. d’arrêter la Chine pour conserver entre ses mains le contrôle du communisme international. C’était une tentative absurde car il est impossible de faire plier la Chine, mais c’était une tentative inévitable car les puissances hégémoniques ne renoncent pas spontanément à leur hégémonie. Le 15 décembre aurait été le jour où l’on aurait dû rendre les comptes. Ce jour-là, celui de la réunion préparatoire de la conférence communiste internationale, on aurait dû jouer cartes sur table. Mais au lieu de la condamnation de la Chine il en serait sorti pratiquement celle de l’U.R.S.S. Les réactions des partis communistes avaient montré que sur le terrain de la conférence, c’est-à-dire de l’épreuve de force entre la Chine et l’U.R.S.S., celle-ci, malgré son immense potentiel militaire, n’avait aucune influence même sur ses satellites les plus fidèles ou désormais les moins infidèles : les Etats de l’Europe orientale, l’Albanie mise à part, et les partis communistes de l’Europe occidentale, ce qui revient à dire que la Chine avait gagné avant même que la partie n’arrive à son terme. La classe dirigeante de l’U.R.S.S. voyait de jour en jour approcher non seulement l’heure de la défaite mais aussi celle de l’humiliation et elle n’avait qu’une possibilité : sacrifier Khrouchtchev pour brouiller les cartes et sauver la face. C’est ce qu’elle a fait. Quoi qu’on en dise, il n’aurait pas été possible de chasser Khrouchtchev du pouvoir pour des motifs exclusivement administratifs ou personnels, c’est-à-dire sans une base politique assez forte pour parer aux contrecoups que son élimination ne devait pas manquer de provoquer.
La Chine, défiée par l’U.R.S.S., a relevé le défi et a gagné. Qu’on se rappelle que, combattue par l’U.R.S.S. et privée de toute aide économique, elle n’a pas chancelé, mais au contraire qu’elle a surmonté la crise en montrant par là à elle-même, ainsi qu’au monde entier, qu’elle est en mesure de se développer toute seule. Elle a de la sorte fait tomber la tutelle russe, à savoir le dernier obstacle qui la séparait du statut de grande puissance. C’est pourquoi on peut considérer que la date de la chute de Khrouchtchev et celle de l’éclatement de la bombe chinoise — qui constitue le revers de la médaille — marquent la naissance du troisième pôle du système mondial des Etats, ou en d’autres termes, le début de sa seconde phase, la première phase multipolaire. Cette phase n’aura pas du tout le caractère tragique que prophétisent tous ceux qui, par peur du nouveau, ou par crainte de perdre une partie de leur pouvoir, ont agité l’épouvantail chinois. Elle aura, au contraire, des effets bénéfiques, parce que, en adaptant les rapports internationaux à la réalité actuelle de la balance mondiale du pouvoir, elle éliminera bon nombre des points de friction qui ont jusqu’à maintenant fait obstacle à la stabilisation de la détente.
Qu’est-ce qui changera ?
Tout d’abord on verra la fin de la construction diplomatique bilatérale mise en œuvre par les U.S.A. et par l’U.R.S.S. pour se renforcer l’un l’autre quand ils s’aperçurent que leur leadership vacillait. Seul le monopole nucléaire pouvait maintenir une construction si artificielle. L’U.R.S.S. voulait conserver le contrôle du communisme international en isolant la Chine, en favorisant ses adversaires asiatiques non communistes et en se liant de plus en plus étroitement aux U.S.A., c’est-à-dire à la puissance qui exclut la Chine de l’O.N.U. et qui menace directement sa sécurité par la tête de pont de Formose et la guerre dans le Sud-Est asiatique. De leur côté les U.S.A. voulaient conserver la direction de l’alliance atlantique et renforcer les liens de solidarité avec les Etats de l’Europe occidentale en dissolvant l’intégration européenne (entrée de la Grande-Bretagne dans le Marché commun) et en favorisant l’U.R.S.S., autrement dit la puissance qui menace directement la sécurité de l’Europe.
La victoire chinoise sur le plan nucléaire et sur le plan des rapports avec l’U.R.S.S. a enlevé toute raison d’être à ces desseins. Dans cette direction l’U.R.S.S. n’a plus rien à gagner, au contraire elle a tout à perdre. N’ayant pas réussi à faire plier la Chine, il ne lui reste, pour éviter la ruine tant à l’intérieur qu’à l’extérieur, qu’une politique : celle de l’unité du communisme international, y compris la Chine. Il est clair que cette unité ne pourra être désormais que polycentrique, donc de plus en plus précaire, même si sa faillite définitive est encore éloignée. Et il est clair aussi que cette politique exige de l’U.R.S.S. qu’elle accentue, au lieu de l’atténuer, la distance idéologique qui la sépare de l’Occident et par conséquent des U.S.A. lesquels, à leur tour, ayant perdu la carte soviétique, devront finalement affronter selon leur nature véritable les problèmes de la situation mondiale et européenne, sans jeux stériles menés sur deux fronts.[1]
La fin de ces rapports bilatéraux entre les U.S.A. et l’U.R.S.S. marquera également la fin d’une idée qui a jusqu’à présent induit en erreur bon nombre de personnes intéressées ou généreuses, celle selon laquelle seuls les U.S.A. et l’U.R.S.S. seraient des puissances sages, les puissances sur lesquelles il faudrait s’appuyer pour établir la paix, la détente, le désarmement, la non-prolifération des armes nucléaires etc… Mais elle ne marquera pas, pour autant, la fin de la possibilité d’atteindre ce que ces objectifs ont de positif, au contraire elle la renforcera. Il ne fait pas de doute que la Chine aussi participera à cette politique qui trouvera de cette sorte, en passant de la presque bilatéralité à la multilatéralité, le soutien de forces beaucoup plus consistantes qu’auparavant.
Il faut ajouter que dans ce cadre nouveau la Chine obtiendra la place qui lui revient, le problème de l’unité européenne se posera d’une façon de plus en plus aiguë et le Tiers Monde verra s’affaiblir l’un de ses alibis : le titisme ou la fuite en avant dans la politique étrangère du “neutralisme actif” pour masquer les faiblesses de la politique intérieure et pour tourner les véritables difficultés de la politique internationale.
En ce qui concerne le Tiers Monde en général, il n’est pas possible dans cet article d’aller au delà de cette remarque. Quant à la Chine en particulier il est certain qu’elle finira par obtenir son admission à l’O.N.U., la neutralisation du Sud-Est asiatique et quelque chose de substantiel à Formose (au minimum un accord bilatéral sur la base de sa neutralisation, au maximum l’annexion). La Chine d’autre part ne pourra pas dépasser certaines limites pour les raisons suivantes : a) elle n’a plus besoin de frapper à droite et à gauche pour sortir de sa situation d’infériorité et elle doit au contraire exercer ses responsabilités de grande puissance ; b) elle se trouve dans la phase stalinienne du communisme qui est objectivement caractérisée par une grande prudence en fait de politique étrangère ; c) elle est obligée de suivre la politique d’unité du communisme international et par conséquent de ne pas trop s’écarter de l’U.R.S.S., avec toutes les conséquences que cela implique ; d) elle rencontre en Asie même de solides points d’arrêt, à commencer par le Japon qui ne pourra pas faire moins que de rester lié aux U.S.A., même si c’est avec une plus grande autonomie, en raison de la structure et de la phase de développement de son économie capitaliste.
En ce qui concerne l’Europe, il faut garder présentes à l’esprit deux sortes de considérations. La première dépend du fait que l’U.R.S.S., pour maintenir l’unité du communisme international, devra de nouveau se montrer intransigeante envers l’Allemagne et l’Europe occidentale, sur le terrain politique du moins. Il ne s’agira plus de la rigidité stalinienne, mais cela suffira cependant pour montrer de nouveau à tous que l’U.R.S.S. est la puissance qui menace directement la sécurité de l’Europe occidentale. Celle-ci par conséquent devra penser sérieusement à sa défense, moins pour faire face à des attaques proprement dites que pour les conjurer et pour disposer d’une base pour la protection des ses intérêts politiques et économiques.
Le second ordre de considérations dépend du fait que, dans l’état actuel de son organisation, l’Europe occidentale ne peut pourvoir efficacement à sa propre défense. L’O.T.A.N. est dépassée parce qu’il s’agit désormais de défendre l’Europe en tant que telle, et non plus seulement comme un pion du jeu mené par les U.S.A. Et la France ne suffit pas non plus, même si son déterrent a indubitablement, pour des raisons géographiques, une fonction européenne, parce qu’elle ne peut pas défendre, à elle seule, même son seul territoire (son déterrent ne pouvant fonctionner que comme détonateur de celui des Américains).
Le problème de la défense de l’Europe est compliqué parce qu’il ne s’agit pas, comme naguère, de défendre les Etats en tant que tels, mais bien l’unité de fait de l’Europe occidentale dans le cadre des diverses phases de développement de son intégration. Or l’Europe a dépassé depuis un certain temps la phase au cours de laquelle sa politique de défense pouvait reposer exclusivement sur le leadership américain. Tel est le fait qui a provoqué la crise de l’O.T.A.N. et a constitué la base de la période “française” de la défense européenne. La France qui, au temps de la C.E.C.A. et de la C.E.D., soutenait politiquement la construction européenne, dans le cadre de la protection américaine, a ensuite joué ouvertement un véritable rôle de représentant politique de l’Europe quand le succès du Marché commun a fait surgir le besoin d’une volonté politique autonome.
Mais ce rôle, qui devient à la fois de plus en plus nécessaire et de plus en plus difficile à exercer de la part d’un seul pays au fur et à mesure que l’Europe grandit, finira par échapper au gouvernement français. Celui-ci a pu l’assurer, au cours des dernières années, par suite d’un fait exceptionnel — la grandeur de de Gaulle — et d’un fait transitoire — la politique des U.S.A. face à l’U.R.S.S. et à la Chine dans la période de dissolution de l’équilibre bipolaire. Il est évident que la France a pu se présenter : a) comme une puissance, la seule, qui s’occupe vraiment de la défense et de l’indépendance de l’Europe, uniquement parce que les U.S.A. se sont appuyés sur l’U.R.S.S. dans leur tentative de faire obstruction au déterrent français et d’étouffer dans l’œuf l’autonomie européenne, en confondant la politique de détente avec celle de leur propre hégémonie ; b) comme le seul Etat occidental qui sache s’adapter à la nouvelle réalité des rapports internationaux par suite uniquement de la politique réactionnaire des U.S.A vis-à-vis de la Chine et du Sud-Est asiatique. Et il est évident que la disparition des rapports spéciaux entre les U.S.A. et l’U.R.S.S. (c’est-à-dire du fait que les U.S.A. favorisaient l’adversaire de l’Europe) et le changement, inévitable à bref ou à moyen terme, de la politique des U.S.A. vis-à-vis de la Chine, affaibliront la position internationale de la France et ses possibilités de représenter politiquement l’Europe, la fonction européenne de sa force de frappe — qui ne suffit cependant pas à faire s’aligner l’Allemagne — demeurant toutefois intacte.
En conclusion l’Europe se trouvera privée ou presque de représentation politique au moment même où elle en aura plus besoin que par le passé à cause soit des nouveaux rapports internationaux, soit de l’état avancé de l’intégration économique. D’autre part il n’est pas douteux que la méthode “communautaire” ne peut pas constituer une alternative au gouvernement français en tout ce qui concerne la représentation politique de l’Europe dans les secteurs désormais concernés, ceux de la défense et de la politique étrangère. Il n’y a qu’une alternative au gouvernement français, le gouvernement européen. Il est fou d’espérer qu’on puisse faire une politique européenne dans les secteurs de la défense et de la politique étrangère avec une “communauté”, c’est-à-dire avec un groupe d’experts sans pouvoir politique, ou avec une Union confédérale, dans laquelle se reproduiraient telles quelles les divergences entre la France et l’Allemagne, tout en étant bien entendu que l’expédient de la M.L.F. (autrement dit la force nucléaire multilatérale) ne suffit pas pour résoudre le problème de la place de l’Europe dans les relations internationales.
On ne peut plus échapper à ce dilemme, ou un gouvernement européen, ou la continuation de la crise de la politique européenne et atlantique. L’épreuve de force entre la France et les U.S.A. est à la fois inévitable et insoluble. Elle est inévitable parce que, tant qu’on n’aura pas de gouvernement européen, d’une façon ou de l’autre, les exigences européennes seront mises en avant par l’Etat européen le plus fort et le plus libre, la France. Mais elle est insoluble parce que la France, à la différence de la Chine vis-à-vis de l’U.R.S.S., n’est pas en mesure de l’emporter sur les U.S.A. D’autre part les Etats-Unis ne peuvent pas, à leur tour, ne pas poursuivre l’épreuve de force avec la France car, tant qu’il n’y aura pas de gouvernement européen, l’unité diplomatique de l’Occident ne peut être assurée que par le leadership américain, c’est-à-dire par une ligne en contraste avec les exigences de l’autonomie européenne.
Ces difficultés actuelles de la politique mondiale dépendent du fait que, virtuellement, l’Europe est le quatrième pôle de l’équilibre mondial.[2] Mais elle n’a pas, à la différence de la Chine, un gouvernement. C’est en cela que réside la cause du plus grand déséquilibre dans les relations internationales, ce fait empêchant l’Europe d’occuper la place qui correspond à son poids dans la balance mondiale du pouvoir. Ce poids n’en existe pas moins, et par conséquent le déséquilibre ne cessera que lorsque l’Europe, par suite de la fondation de son propre gouvernement, occupera la place qui lui revient. A ce moment-là un principe tout à la fois très dynamique et très pacifique commencera à fonctionner, et il sera de la sorte aisé de procéder à bien des changements pacifiques dont le monde a besoin.
Le Fédéraliste
[1] Cette prévision est fondée sur l’hypothèse d’une atténuation de la lutte entre l’U.R.S.S. et la Chine. Il y a cependant des commentateurs qui escomptent, au contraire, son aggravation. Nous croyons qu’ils ne considèrent pas un facteur essentiel : le besoin d’unité du communisme international. La rupture de cette unité entraînerait : a) la ruine de l’idéologie communiste là où le développement économique l’a déjà affaiblie, et par là-même, la décomposition de la base du pouvoir étatique, le parti unique ; b) son affaiblissement là où s’impose, dans le but de développer l’économie, une concentration monolithique du pouvoir. Il est évident, d’autre part, que les dirigeants chinois, une fois dépassée la question de vie et de mort que la tentative de les excommunier avait fait naître, ne voudront certainement pas mobiliser à la fois les Chinois contre les Américains et contre les Soviétiques. Ils se borneront, sans doute, à les mobiliser contre les Américains pour des raisons idéologiques ainsi que politiques (ils ont, à l’heure actuelle, plus à gagner dans la zone asiatique soumise à l’influence américaine que dans les questions frontalières avec l’U.R.S.S.).
Bien sûr c’est vrai qu’il y a antagonisme entre les intérêts politiques et économiques de l’U.R.S.S. et de la Chine. Mais si notre observation est exacte, c’est vrai aussi que le conflit qui en résulte ne pourra être poussé jusqu’à ses dernières conséquences que lorsque l’U.R.S.S. — mais ce ne sera plus l’Union des républiques socialistes soviétiques — pourra se passer du communisme, c’est-à-dire lorsque son parti unique se sera effrité.
Le conflit entre l’U.R.S.S. et la Chine ainsi que tous les conflits impliqués dans les différentes “voies nationales” du communisme, montrent donc : a) la faiblesse de l’unité du communisme international dans la phase qui va s’ouvrir (le communisme n’est pas en mesure de résoudre les problèmes internationaux posés par son développement, il ne peut que les atténuer jusqu’à ce que ceux-ci le balaient) ; b) le point où se produira l’éclatement de cette unité (le communisme, encadré dans les Etats nationaux par le choix du “socialisme dans un seul pays”, en est resté prisonnier et a trouvé dans la raison d’Etat et dans la politique internationale la limite de son développement).
[2] C’est ici le lieu de rappeler que certains auteurs estiment comme nous que la phase bipolaire de l’équilibre mondial est close, mais qu’ils en ont fait coïncider la fin non pas avec l’avènement de nouvelles puissances continentales (la Chine et, virtuellement, l’Europe) mais avec le retour en force des moyennes et petites puissances. Pourtant, si l’on y regarde de près, ces prétendues puissances ne disposent pas d’un véritable pouvoir de décider et de guider au niveau international ; elles ont seulement celui de faire chanter les grandes puissances. D’un autre côté si l’on pense que les moyennes et petites puissances sont en mesure d’acquérir une stabilité et une influence internationale, on perd de vue le cours de l’histoire et la ligne du développement de la politique mondiale, qui mènent tous deux à la formation de grandes unités continentales.